L’arrêt est inédit en France. Le 7 décembre 2023, la cour d’appel de Nîmes, sur décision de renvoi de la Cour de cassation, a demandé à Energie Renouvelable du Languedoc (ERL), filiale de Valeco-EnBW, de démanteler sept éoliennes sur le plateau de Bernagues, à Lunas, à l’ouest de Montpellier (Hérault). La société dispose de quinze mois pour remettre le site en état, sous peine de 3 000 euros de pénalité par jour de retard pendant six mois, avant retour à la case tribunal (1).
Ces aérogénérateurs ont été édifiés en 2016, en zone classée, malgré l’annulation à deux reprises du permis de construire, pour insuffisance de l’étude d’impact et mortalité d’espèces protégées, la seconde annulation de permis étant intervenue une fois la construction achevée. Après avoir demandé en vain à la société de régulariser sa situation, le préfet a ordonné l’arrêt de fonctionnement des éoliennes. Il a ensuite levé la suspension en édictant d’autres mesures pour l’exploitant.
Les juges ont conclu que « la réalité des atteintes environnementales sérieuses est avérée »
C’est dans ce contexte que Vigilance Patrimoine paysager et naturel (VPPN), l’Association protection des paysages et ressources de l’Escandorgue et du Lodévois (Apprel) et la Société pour la protection des paysages et de l’esthétique de la France (Sppef) ont saisi le juge judiciaire pour demander la démolition des éoliennes et la remise en état des lieux sous astreinte. Ces associations accusaient l’installation d’être responsable d’une forte mortalité de l’avifaune, nuisant à la conservation d’espèces protégées : plus de 1 000 cadavres d’oiseaux ont été retrouvés en 2020, rien qu’au pied des éoliennes. « La question était de savoir si l’annulation définitive du permis en Conseil d’Etat, qui a rejeté le pourvoi de l’exploitant en 2017, pouvait être sanctionnée par une démolition. Le juge administratif n’ayant pas la compétence pour statuer, nous avons saisi le juge judiciaire », précise Me Nicolas Gallon, avocat du collectif.
Etude d’impact insuffisante. La cour nîmoise s’est appuyée sur l’article L. 480-13 du Code de l’urbanisme, pour considérer que la démolition d’une construction ne peut être ordonnée que si le permis a été « annulé pour excès de pouvoir » par le juge administratif et si la méconnaissance de la règle d’urbanisme ou des servitudes a causé « un préjudice personnel direct au demandeur ». L’insuffisance de l’étude d’impact relative à la présence d’un couple d’aigles royaux a été reconnue comme une violation substantielle de ces règles, ayant conduit à l’annulation du permis. Les juges ont aussi estimé que la condamnation à démolir au titre de cet article est subordonnée à « la localisation géographique de la construction dans l’une des zones visées à l’article L. 480-13 1° » – , sans qu’il faille prouver la violation de ce régime de protection propre à cette zone. En l’occurrence, l’opération litigieuse se situe à la fois dans une zone de montagne, en zone N du PLU, en zone naturelle d’intérêt écologique, faunistique et floristique et en zone de protection spéciale « Oiseaux sauvages ».
La justice estime donc que les carences de l’étude d’impact ont eu pour conséquence un défaut d’information des associations, mais aussi une prise de décision préfectorale de façon partiellement éclairée, ce qui a conduit à faire fonctionner les éoliennes « dans un cadre non suffisamment réglementé, à l’origine d’un préjudice notamment pour la protection des oiseaux. »
Sanction proportionnée. Enfin, concernant la proportionnalité de la sanction, les juges ont conclu que « la réalité des atteintes environnementales sérieuses est avérée », et que l’exploitant ne justifie pas de la mise en œuvre de solutions techniques efficaces pour remédier à la mortalité aviaire. Contactée par « Le Moniteur », ERL annonce se pourvoir en cassation, et que « dans le respect de cette échéance, il n’y aura pas de commentaire. » L’arrêt nîmois devrait toutefois montrer « qu’il ne faut pas s’empresser d’implanter des machines sans attendre l’issue de recours et l’obtention définitive de permis ou d’autorisations », commente Jean Pougnet, cosecrétaire du collectif Toutes Nos Energies – Occitanie Environnement. Cette décision rappelle en outre « qu’une sanction, pouvant aller jusqu’à la démolition, est attachée à un manquement. En ce sens, on peut considérer qu’elle fera jurisprudence », conclut Me Nicolas Gallon.
(1) CA Nîmes, 7 décembre 2023, nos RG 23/00353 et RG 23/00634.
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