Face à l’urgence climatique, la guerre aux passoires thermiques est déclarée. Le mot d’ordre des pouvoirs publics ?
Accélérer la rénovation énergétique des logements pour atteindre en 2050 le niveau « BBC (bâtiment basse consommation) rénovation » ou l’étiquette énergie A ou B du diagnostic de performance énergétique (DPE).
Ce chantier est énorme au regard du nombre de copropriétés existantes sur le territoire national (514 903) construites pour 72 % d’entre elles avant 1980, selon l’Agence nationale de l’habitat (Anah).
Et plus de 70 % de ce parc collectif se trouvent dans les classes D à G du DPE. « Aujourd’hui, la prise de conscience est là. Il y a une appétence des copropriétaires à se renseigner sur les obligations, les solutions techniques et les aides possibles », note Alain Audras, codirigeant des agences immobilières Citya & Audras Delaunois à Grenoble.
L’agence locale de l’énergie et du climat (Alec), en charge de l’accompagnement technique et organisationnel du dispositif métropolitain d’aide “Mur Mur”, le constate aussi.
Précurseur et abondé par certaines communes, celui-ci a impulsé une dynamique de rénovation énergétique des copropriétés du territoire : 10 000 logements ont été ainsi rénovés en 10 ans.
Une démarche volontaire
Et les sollicitations pour bénéficier de Mur Mur ne faiblissent pas. « Depuis début 2022, nous enregistrons en moyenne 15 inscriptions de copropriétés par mois, contre un peu moins de cinq par mois en 2020. Et le rythme est resté identique en 2023 », indique Cyrielle Courte, chargée de mission habitat collectif de l’Alec.
La démarche est toujours volontaire. Mais il faut du temps et de l’énergie pour convaincre les copropriétaires, comme cela a été le cas pour le projet de rénovation énergétique de L’Élan, copropriété grenobloise de 44 appartements.
Un chantier d’un peu plus d’un million d’euros (TTC) dont les 18 mois de rénovation énergétique se terminent. « Nous n’étions pas loin d’être une passoire thermique », reconnaît Jean-Pierre Lonati, membre du conseil syndical très impliqué dans ce dossier accompagné, en plus de l’Alec, par l’association Soliha en charge du volet financier de Mur Mur.
Toit, façades, planchers bas, fronts et joues de balcon ont été isolés. Les menuiseries des parties communes ont été changées et la vieille chaudière fioul remplacée par une au gaz.
L’obtention des subventions a été décisive pour le vote du projet en assemblée générale (AG) de copropriété en juin 2021. « Notre chantier a été retardé par le Covid et un changement de syndic, mais sans l’accompagnement financier de Mur Mur, nous n’y serions sans doute pas arrivés », témoigne-t-il.
L’obligation d’isoler
Seule obligation imposée par le dispositif métroplitain : lorsqu’une copropriété envisage des travaux importants sur ses façades, – un ravalement par exemple -, ou sur sa toiture, elle doit étudier la possibilité d’effectuer à cette occasion une isolation par l’extérieur.
Cette obligation nationale est rappelée dans le plan local d’urbanisme intercommunal (PLUi) métropolitain et l’autorisation de travaux sans isolation accordée seulement en cas d’impossibilités techniques, architecturales ou de retour sur investissement trop long.
« Et nous devons le justifier », précise Alain Audras. Avoir par exemple un ravalement de façade ou une étanchéité de toit à réaliser à court terme permet d’embarquer souvent plus facilement une copropriété dans sa rénovation énergétique.
« Les copropriétaires ne regardent alors que les surcoûts liés à l’isolation », explique Cyrielle Courte. Et si ces surcoûts peuvent être minimisés par l’octroi d’aides, cela peut être déterminant, comme pour les copropriétaires de la résidence Les Bruyères à Seyssinet-Pariset.
Un accompagnement complet
« Entre le coût d’un simple ravalement et la rénovation énergétique envisagée avec Mur Mur, cela ne revenait pas bien plus cher aux copropriétaires occupants modestes et très modestes grâce aux aides individuelles possibles. Et ils étaient majoritaires dans notre résidence », souligne Jean-Michel Savoyat, l’un des 20 copropriétaires des Bruyères, alors président du conseil syndical.
Là encore, les simulations effectuées par Soliha ont incité les copropriétaires à sauter le pas. L’opération a été votée en AG à l’unanimité moins une voix.
« L’Alec et Soliha nous ont portés à bout de bras. Grâce à eux, nous avons énormément gagné en confort d’été et d’hiver. Et côté chauffage, notre volume de gaz consommé a baissé de 35 % », se félicite le copropriétaire.
Au-delà des subventions mobilisables, l’accompagnement Mur Mur est en effet tout à la fois technique, organisationnel, administratif et financier et le parcours proposé ponctué de réunions, d’études techniques, de simulations financières et demandes de subventions globales et individuelles, de suivi des travaux… Et une réunion obligatoire est organisée en amont pour présenter le dispositif aux copropriétés nouvellement inscrites.
Des travaux qui restent coûteux
Mais les freins à la rénovation énergétique des copropriétés restent prégnants. Cela coûte cher, et plus encore depuis 2020 avec la hausse des prix des matériaux et l’inflation.
Une rénovation énergétique totale revient en moyenne à 25 000 € par logement. Les subventions mobilisables peuvent réduire la facture lorsque l’opération engagée entre dans les critères des dispositifs d’aide.
Au niveau national, le reste à charge moyen est de 8 000 € par logement, selon l’Agence nationale de l’habitat (Anah).
La durée comme frein ?
Mais si pour les copropriétaires occupants modestes et très modestes ce reste à charge peut être bien plus faible, pour les autres, il peut être important et rédhibitoire.
Toutes les rénovations ne répondent pas aux conditions d’aide. « Nous avons beaucoup de copropriétés en centre-ville, des immeubles en pierre ou en ciment moulé qui ne se prêtent pas à l’isolation par l’extérieur », illustre Alain Audras.
Autre frein, la durée de l’opération. Au vu des enjeux financiers et du mode de décision en copropriété (avec le vote en AG), il faut au minimum quatre ou cinq ans entre la décision d’engager l’étude préalable et le démarrage des travaux.
Un enjeu majeur
« Ce sont des projets clivants. Sans des copropriétaires impliqués qui font le lien, expliquent, persuadent, cela ne marche pas », constate Fabien Robles, directeur du Cabinet Heurtier, agence immobilière à Grenoble et Voiron.
La crise de l’énergie donne plus d’acuité à la démarche. Le gel des loyers et l’interdiction de louer les passoires thermiques introduits par la loi Climat & résilience aussi.
« La rénovation énergétique est l’enjeu majeur des copropriétés, mais pour nous qui les accompagnons, ce n’est pas évident », souligne Nicolas Delamarche, cogérant de l’agence immobilière Régie Immobilia à Grenoble.
Relever ce défi va prendre du temps. « Mais il ne faut pas désespérer. Il va falloir plus de visibilité, des indicateurs clairs sur la performance énergétique, revoir peut-être les règles de majorité en AG… », avance Alain Audras.
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