Le temps des villes et des territoires : interview
Par Charles Ambrosino, historien et urbaniste, professeur à l’Institut d’urbanisme et de géographie alpine.
Comment réconcilier métropoles et campagnes, périphéries et centres-villes, écologie et habitat. A l’heure de la transition écologique, en partenariat avec la Plateforme d’observation des projets et stratégies urbaines (Popsu), plongée dans les projets et initiatives qui font bouger les politiques urbaines; en attendant notre supplément de 12 pages à paraître le vendredi 30 juin.
Historien et urbaniste, professeur à l’Institut d’urbanisme et de géographie alpine, Charles Ambrosino a coordonné l’ouvrage la Métropole géographique et ses urbanismes, Grenoble ou l’art (oublié) d’habiter la plaine, paru dans la collection des carnets Popsu. Il analyse l’impact du rapport des politiques publiques à la géographie, et appelle à «renverser la métropole sur ses franges».
Vous livrez le diagnostic d’un espace urbain fracturé, qui a tourné le dos à sa géographie…
L’histoire de Grenoble est une histoire d’eau. Ce territoire de plaine, au croisement de vallées alpines, est resté pendant des siècles quasiment inhabitable à cause des crues régulières de l’Isère et du Drac. Ces inondations successives et meurtrières ont façonné un rapport double à l’eau. D’un côté, elle représente un risque dont on se prémunit en l’endiguant ou en l’enterrant, de l’autre, elle est une force productrice d’électricité ; la «houille blanche» est exploitée dès la fin du XIXe siècle. A mesure que s’urbanise la plaine grenobloise, ses caractéristiques paysagères, fortement liées à l’eau, vont être invisibilisées : la métropole s’est ainsi construite malgré sa géographie. Au nord-ouest par exemple, les cours d’eau entre les piémonts du Vercors et de Chartreuse sont aujourd’hui fragmentés par de multiples infrastructures, lacérés par des tracés routiers, autoroutiers, ferroviaires et de gazoducs.
Finalement, pourquoi vouloir reconnecter Grenoble à sa géographie ?
Cela permettrait de valoriser la plaine, qui n’a certes pas le caractère extraordinaire de la pente et des sommets, mais qui est le paysage quotidien de la majeure partie des habitants de la métropole. Dans un monde qui se réchauffe – les Alpes subissent les bouleversements climatiques de manière accélérée, Grenoble est particulièrement exposée aux hausses de températures –, il est essentiel de pouvoir accéder à l’eau, à sa fraîcheur et à des espaces végétalisés, à travers des modes de déplacements doux. Cette proximité de «nature» est particulièrement importante pour les territoires du sud Grenoblois, qui concentrent la majorité des logements sociaux, et dont les habitants entretiennent souvent un rapport distant à la montagne.
Comment réintégrer la question de l’eau dans la fabrique urbaine ?
Retrouver les tracés des rivières et des torrents, les trames bleues et vertes qui constituent ce territoire, permettrait de lier les quartiers excentrés et défavorisés avec de nouvelles centralités. Les possibilités de transformation se situent surtout dans les franges de l’agglomération, en périphérie, car c’est là que les digues sont le plus malléables, et que se situent de grands espaces naturels à valoriser. Le parc de La Poya, à Fontaine, est emblématique. Il fait face au Géant Casino, point de départ de la Zac des Portes du Vercors, un espace asphalté qu’on pourrait qualifier de «franchisé», parce qu’abandonné à la consommation de masse, et raconte la relégation d’activités essentielles en bordure de métropole – vraiment au bord, juste avant de monter sur la pente !
L’idée est donc de renverser la métropole sur ses franges, en faisant de l’Isère ou du Drac de véritables espaces publics et paysagers, des rivières métropolitaines. Ce n’est pas simple, d’autant que par définition, l’eau n’a pas de frontière communale, mais c’est là que se joue une partie de l’avenir grenoblois.
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